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Herbier de Posidonie, source de vie

La posidonie enferme en elle un mystĂšre de la vie. nous aimons l’appeler l’herbe des dieux, et de PosĂ©idon bien entendu en premier ! On lui doit beaucoup. La splendeur des fonds marins de mĂ©diterranĂ©e, Ă  Kerkennah comme en Italie ou en Corse par exemple provient du biotope associĂ© Ă  la posidonie. Nous voulons ici revenir sur cette richesse naturelle qui fait tout le charme et la valeur du patrimoine marin de Kerkennah d’autant que la posidonie danse au grĂ© des courants dans les hauts fonds. Elle donne ainsi une propriĂ©tĂ© exceptionnelle Ă  l’eau de mer de la zone cĂŽtiĂšre de Kerkennah. Sa prĂ©servation est plus qu’un devoir moral, c’est une condition de vie, comme nous allons le voir.

Variation climatique : une fragilité accrue pour les ßles

Alors que la contribution des Ăźles aux effets de serre est marginale, les consĂ©quences des dĂ©rĂšglements climatiques globaux ont quant Ă  eux, des consĂ©quences importantes sur les Ăźles et notamment sur les Ă©cosystĂšmes marins. C’est l’effet papillon ! La pollution dĂ©mesurĂ©e des zones industrielles dans le monde impacte silencieusement l’Ă©quilibre naturel des petites Ăźles discrĂštes et comparativement, peu Ă©mettrices de CO2. Kerkennah ne fait malheureusement pas exception.

Nous dĂ©noncions dĂ©jĂ  en 2015 la richesse et la fragilitĂ© du monde marin kerkennien en dĂ©plorant l’impact anthropique sur place. Voici quelques articles qui mĂ©ritent d’ĂȘtre relus Ă  ce sujet. Sujet qui continue imperturbablement d’ĂȘtre d’actualitĂ©.

Principaux facteurs humains de détérioration de son espace vital

Plusieurs perturbations de notre écosystÚme global sont observées et ont des réalités bien concrÚtes à Kerkennah en particulier.

  • Invasion biologique, comme le crabe bleu bien connu du Golfe de GabĂšs
  • Pollution terrestre et marine comme le plastique qui envahit terre, mer et tue les animaux marins et leur espace de vie
  • Érosion ou dĂ©clin massif de la biodiversitĂ©, comme l’appauvrissement des Ă©cosystĂšmes entourant les coraux ou la posidonie qui sont sensibles aux variations de tempĂ©rature et du niveau des eaux
  • Épuisement par sur-exploitation (usage massif et intensif) des ressources naturelles, comme les poissons pĂ©chĂ©s au chalut destructeur du berceau de vie de la faune et de la flore aquatique

Affronter la tragique hypothĂšse de Darwin

Une des conséquences majeures du réchauffement climatique est la montée des eaux. Elle impacte trÚs directement les ßles et notamment les plateaux de hauts fonds, comme à Kerkennah. Quelle conséquence ?

Certaines variations peuvent entraßner la disparition des individus concernés

La montĂ©e du niveau des mers modifie la spĂ©cificitĂ© de l’Ă©cosystĂšme des hauts fonds (plateaux marins, eaux peu profondes). Par exemple, la Posidonie qui vit Ă  fleur d’eau, a besoin de lumiĂšre pour vivre et fournir au biotope marin son Ă©quilibre vital. En ce sens, la posidonie est une espĂšce clĂ© de l’Ă©cosystĂšme marin de Kerkennah. La montĂ©e des eaux nuit Ă  sa persistance.

Les perturbations que nous connaissons gĂ©nĂšrent un stress Ă  la Posidonie qui pourrait bien nous couter la vie ! En effet, la perturbation de son environnement induit des variations nuisibles pour l’ensemble de l’Ă©cosystĂšme marin qui en dĂ©pend. Une montĂ©e des eaux appauvrit, et Ă  terme, potentiellement, dĂ©truit les bio-ressources dont nous dĂ©pendons aujourd’hui. Qui n’a pas l’image choc des rĂ©cifs de coraux morts, dĂ©nuĂ©s de toute vie autour. Des cimetiĂšres aquatiques qui font pleurer les plongeurs amoureux des fonds marins colorĂ©s, vivants, riche d’une biodiversitĂ© digne d’un paradis perdu. C’est un effet domino sur la biodiversitĂ© dĂ©finie comme l’ensemble des espĂšces et leur renouvellement dans un Ă©cosystĂšme donnĂ© et entre Ă©cosystĂšmes.

Stress de la Méditerranée : un crach test grandeur nature

Or savez-vous que la Méditerranée est un bassin précieux de diversité aquatique ? Sa composition mérite un détour. La méditerranée est un trésor de la Vie :

  • 200 000 espĂšces animales identifiĂ©es
  • 15 lignĂ©es (Phylum) endĂ©miques sur 33 connues (dont 32 prĂ©sentes dans le milieu marin)
  • 13 200 espĂšces de poissons recensĂ©es dont 80% en zone cĂŽtiĂšres !
  • 18% d’espĂšces sont en eaux profondes
  • 2% d’espĂšces sont Ă©pipĂ©lagiques (vivant dans la couche marine superficielle entre 0 et 200 mĂštres de profondeur)
  • Son littoral est de 46 000 km, faisant de la MĂ©diterranĂ©e, la plus grande mer semi-fermĂ©e au monde
  • Elle ne reprĂ©sente que 1% des eaux de la planĂšte mais sa biodiversitĂ© en fait une mer sacrĂ©e enfermant 4 Ă  18% des espĂšces connues Ă  ce jour sur la planĂšte bleue !

Mais la MĂ©diterranĂ©e est un trĂ©sor de vie menacĂ©e. D’aprĂšs l’Ă©tude sur 30 ans de l’Institut de recherche pour la conservation des zones humides mĂ©diterranĂ©ennes, les suivis d’abondance de plus de 80.000 populations animales font apparaitre des statistiques qui interpellent :

  • Baisse de 20 % (pĂ©riode : 1993 – 2016) des populations vertĂ©brĂ©es du bassin mĂ©diterranĂ©en
  • Baisse de 52 % dans les Ă©cosystĂšmes marins (pĂ©lagiques et cĂŽtiers)
  • Baisse de 90% de la seule population du thon rouge (de 1995 Ă  2007, la biomasse de thon rouge s’est appauvrie chaque annĂ©e de 50.000 Ă  61.000 tonnes au titre de la pĂȘche industrielle)
  • On notera aussi une baisse de 28 % dans les Ă©cosystĂšmes d’eau douce (zones humides et riviĂšres)

Et oui, la connaissance vaut mieux que l’ignorance pour prendre conscience du monde vital dans lequel nous agissons.

The Fittest Survives

Pas sĂ»r donc que l’homme domine en vĂ©ritĂ© l’environnement. Le faisant disparaitre, il provoque l’extinction de ce qui le maintient lui-mĂȘme en vie. Comme le dĂ©montre le rapport de Chatenoux et alii (2015, p. 5), “la seule possibilitĂ© d’adaptation (aux changements climatiques) consiste Ă  rĂ©duire les impacts localement induits, par une meilleure gestion et prĂ©servation des ressources naturelles”.

S’adapter ou mourir, Darwin concluait ainsi sur la maxime bien connue “The fittest survives”. Kerkennah fera-t-elle preuve de rĂ©silience adaptative ? Qu’en sera-t-il de sa posidonie, vĂ©ritable pouponniĂšre du monde marin ?

La suite dans un prochain article.

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Sources exploitées :
Bouchard Bastien E. (2017), “L’impact anthropique des changements climatiques : nouveau constat scientifique ?” https://www.inspq.qc.ca/bise/l-impact-anthropique-des-changements-climatiques-nouveau-constat-scientifique
Chatenoux, B., Allenbach, K., Peduzzi, P., Lafitte, A., Touzi, S. & Ben Zakour, M. 2015. IntĂ©gration de la variabilitĂ© et des changements climatiques dans les stratĂ©gies nationales GIZC : Contribution Ă  l’actualisation du plan de gestion intĂ©grĂ©e des zones cĂŽtiĂšres de l’archipel de Kerkennah. GRID-GenĂšve, Plan Bleu et GWP Med.
Dumestre M., Janson A.-L., de Bettignies T. (2022) Etude de faisabilité pour la Liste Rouge des EcosystÚmes des herbiers de phanérogames marines de France métropolitaine. Rapport PatriNat (OFB-CNRS-MNHN), 41 p

A propos de l'auteur...

Mehdi Kachouri

Fondateur du site, Kerkenniens dans l’ñme et passionnĂ© des iles de Kerkennah. Sans trop de chichi ni de paillettes, j’ai ouvert cet espace car depuis son origine, je souhaite pointer les beautĂ©s mais aussi les dĂ©sastres de Kerkennah. Je vous invite Ă  me suivre dans mes Ă©changes si vous le souhaitez.

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