Feker qui nous a confié dans un précédent article "Où est passée la notion de bien public ?" sa passion pour la préservation du patrimoine kerkennien, revient sur l’histoire des LOUDS et la disparition inévitable de ce symbole et de la mémoire de l’histoire de la Tunisie et de Kerkennah dont les politiques semblent ignorer la valeur historique et politique de ce bateau mythique. Quel triste constat !
Qui ne connait pas Le Loud ?
Qui ne connait pas Le Loud ? Pourtant lorsqu’on prononce ce nom la jeune génération Kerkennienne, dans sa grande majorité, le confond avec les Car-ferry qui assurent les traversées entre Kerkennah et le continent.
Je voudrais revenir sur un sujet qui constitue l’un des objets de l’Association Kerkena Pour le Patrimoine Maritime et Culturel Méditerranéen. Il s’agit de l’importance de la préservation et de la valorisation du patrimoine maritime de Kerkennah. Or le Loud est le bateau emblématique de l’archipel, et à notre connaissance il ne reste plus que 5 exemplaires de Loud Kerkenniens dans le Monde, 2 ont été construits ces 10 dernières. la construction du dernier en 2008 a été financée par le Ministère de la Culture, lorsque l’ancien Président de la République, déchu, avait visité Kerkennah. Depuis, ce loud est abandonné face au Grand Hôtel alors qu’il mériterait un bien meilleur sort en rapport avec sa dimension patrimoniale.
Vestige de Kerkennah Le Loud (Bateau) de 2009 - 11024 SFLa plaque commémorative de la dernière construction navale du Loud de Kerkennah – SF 11024 – 2009 – Il y est inscrit "Bateau traditionnel à voile propriété du Ministère de la Culture, construit au chantier naval de Fathi AROUSS (El Attaya) sous la supervision du Professeur Abderrahman AYOUB."
Un patrimoine en partage
Nous exprimons ici en tant qu’association qui œuvre pour la valorisation du patrimoine maritime de Kerkena, notre souhait de le voir restauré et le faire naviguer pour organiser des sorties en mer pour les Kerkenniens qui seraient ravis de voir leur bateau emblématique toutes voiles dehors. Avec les recettes des sorties en mer, ce Loud pourra être régulièrement entretenu et pourra continuer à naviguer pour le plus grand plaisir des visiteurs de Kerkena.
Un autre Loud construit en 1992 par une association française et qui a été emmené dans le sud de la France, était dans notre ligne de mire. En effet ce bateau ne rentrait pas dans la catégorie de bateau du patrimoine selon la législation maritime Française, car il avait moins de 30 ans d’âge.
N’ayant pas reçu l’autorisation de naviguer pour des raisons de réglementation maritime qui imposait des modifications à son étrave (proue), ce Loud qui s’appelle Haj Ameur, a été abandonné à son sort jusqu’à ce qu’un charpentier local passionné procède à une première restauration.
Nous avons jugé opportun de l’inviter lors de notre participation à l’événement « Marseille Capitale Européenne de la culture » à laquelle nous avions participé avec une exposition « Kerkena au fil de l’eau » ainsi qu’une conférence sur le Loud qui a été donnée par le feu Docteur Ali EL Hili Ex Doyen de la Faculté de sciences de Tunis.
Ne pouvant toujours pas naviguer, pour les mêmes raisons réglementaires évoquées précédemment, j’ai approché le propriétaire de ce Loud suite à cet évènement il y a quelques années, et il était prêt à le concéder à notre association si celle-ci s’engageait à le restaurer et à le faire vivre.
Indifférence inacceptable face à un patrimoine en destruction
Mais plus récemment il a été l’objet de la création d’une association Française qui porte son nom et dont l’objet est de le restaurer et de le faire naviguer en France…(à suivre)
Enfin, le dernier et le plus fameux Loud qui se trouve à Beit Ennajet, fait mal au cœur à voir…et ne mérite pas d’être publié ici, ni d’ailleurs exposé dans son état actuel. Brulé et délaissé comme le musée qui l’abrite, il faudrait que les ministères concernés ( Culture et Patrimoine ) puissent d’abord consentir à restaurer Beit Ennajet qui abrite cette relique du Loud qui a servi à faire évader, de Kerkennah en Lybie, Le Président Bourguiba, qui était poursuivi à l’époque par les hommes de main du colonisateur Français en Tunisie.
Au-delà des personnes, nous sommes en droit en tant que Kerkenniens, de garder une trace de notre contribution à la lutte pour l’indépendance de la Tunisie. Encore faut-il qu’il y ait une volonté politique, pour restaurer d’abord le petit musée pour que cet exemplaire du Loud puisse être restauré, car c’est aussi le « Loud » le bateau emblématique de Kerkennah reconnu partout en Méditerranée.