Une sculpture qui fait débat sur le rond point "El Chargui" à Kerkennah
Alors que se déroule le 1er Festival international des crabes bleus, nous observons des réactions multiples au sujet de la mise en place de l’œuvre sculpturale de Salah Ben Amor. Cette production artistique du crabe bleu fait suite à l'appel d'offres par la Direction générale de la Pêche et de l'Aquaculture de Tunisie. Cet appel d'offres s'inscrit dans le cadre du financement du projet européen Bleu-Adapt. Cette sculpture du crabe bleu, pour cette première édition du Festival international éponyme, fait polémique. Essayons d'en comprendre les raisons.
Un projet européen d'adaptation, de valorisation et de préservation de l'environnement
Le projet européen Bleu-adapt porte sur "l'Invasion biologique marine et pêche : étude, atténuation des dommages et adaptation dans le contexte du changement climatique". Deux zones cibles liées à l'invasion du crabe bleu sont bénéficiaires de ce programme, la Tunisie et l'Italie, concernées toutes deux de près, par cette espèce invasive. Le premier festival international des crabes bleus est financé par ce projet européen.
Une sculpture pour une action de visibilité
En Tunisie le projet est piloté par la Direction Générale de la Pêche et de l'Aquaculture. Dans ce cadre, un appel à candidatures d'artistes a été lancé. L'objectif est de sélectionner une œuvre d'art dédiée à l'aménagement paysager à Kerkennah, notamment pour être exposée sur le rond-point "El Chargui". D'une valeur maximale de 10 000 euros l’œuvre retenue a fait l'objet d'un bon de commande avec exonération de TVA. Cette dépense est comptabilisée en coût des services du projet Bleu-Adapt dans la ligne budgétaire "Action de visibilité". Il est donc normal que cette sculpture soit vue et débattue !
Ce qui fait polémique : le choc des titans de Kerkennah
Deux arguments font polémique. Ce n'est pas tant l’œuvre en elle-même de Salah Ben Amor qui est visée. Mais c'est le choix du crabe comme symbole à Kerkennah.
🐙 Poulpe contre crabe 🦀 : Une polémique d'ordre symbolique
En effet, la première polémique relève de l'attachement à l'animal fétiche et emblématique de Kerkennah. Ce n'est pas le crabe mais son prédateur le poulpe pêché en gargoulette typiquement kerkennienne. Ainsi mettre sa proie au centre d'un rond-point à proximité des deux principaux ports de pêche pourrait être vu comme une provocation. Toutefois, notons que la galerie d'art et les fresques du port d'El Kraten mettent à l'honneur la faune marine sans distinction.
Une fausse polémique : la faune marine à l'honneur
Dans de sublimes teintes colorées, tortue, crevette, étoile de mer côtoient tout autant le crabe que le poulpe, roi des eaux kerkenniennes et star des traditions culinaires de l'archipel (Mloukhia au poulpe (bel karnit) de Kerkennah, Salade de poulpe à la kerkennienne, Couscous aux poulpes de Kerkennah (Kosksi bel karnit min Kerkennah) et tant d'autres recettes inspirantes que vous retrouverez sur la page Recettes de cuisine).
Remarquons aussi que le crabe, comme le poulpe, devient un mets apprécié dans les plats. Vous pourrez le découvrir durant le festival international des crabes bleus. En effet, dans le cadre de la valorisation des espèces marines, l'Académie nationale de cuisine française, délégation tunisienne présidée par Mounir Arem participe à l'événement avec un show cooking. Cet atelier culinaire est animé par cinq chefs cuisiniers qui proposent diverses créations culinaires autour du crabe.
Espèce invasive : rente commerciale ou biodiversité, il faut choisir...
Le projet bleu-adapt et le festival international des crabes bleus visent à concevoir une réponse à l'invasion de Portunus, ce crabe bleu apparu depuis 2014 dans le golfe de Gabès. Pour certains il aurait été préférable de ne pas le mettre en avant alors que d'autres considèrent en ligne avec le projet Bleu-adapt et le festival, que cette espèce invasive devient une star de pêche et d'assiette. Ainsi la contestation au sujet de cette oeuvre d'art est aussi d'ordre politique. En effet, elle révèle le débat sur la légitimité de saisir cette arrivée du crabe bleu comme une aubaine commerciale alors même qu'elle engendre un déséquilibre majeur de l'écosystème et une menace observable de la biodiversité.
Dépassement et proposition : L'art au service de la chaine alimentaire !
Ces polémiques que nous observons nous invitent à les franchir. Leur dépassement pourrait consister à faire trôner ensemble proie et prédateur, tous deux nécessaires à l'équilibre de la chaine alimentaire et de la biodiversité, tout simplement indispensable à la Vie. Ainsi Crabe bleu et poulpe ensemble rappelleraient ô combien cet équilibre est fragile et se doit d'être respecté !
Poulpe de Kerkennah planant au dessus du Crabe bleuDans l'esprit de kerkenniens.com, concluons avec un peu d'humour aigre-doux. Il est avéré que le poulpe disparait aussi de l'espace kerkennien. Mais qu'à cela ne tienne, l'un des autres prédateurs du crabe bleu est l'alligator. Ainsi, avec l'arrivée massive du crabe bleu, le déséquilibre de l'écosystème pourrait potentiellement se traduire par l'arrivée en masse d'un de ses prédateurs majeurs...
Alligator : future espèce invasive à Kerkennah après le crabe bleu !Imaginez Kerkennah, dans ses hauts fonds d'or
heureux de flotter à la surface de ces eaux chaudes en été
Des yeux d'alligators
Repus de crabes bleus en quantité.
A quand le premier festival des alligators à Kerkennah et un rond point dédié ?
Quelque chose à ajouter ? Dites-le en commentaire.